Une innovation développée par une équipe de chercheurs de l’Université de Tel Aviv permet de transformer les déchets humides que nous jetons à la poubelle en biocarburants liquides et solides, sans avoir à les sécher. Les chercheurs estiment qu’à l’échelle nationale, les carburants produits à partir de déchets organiques peuvent, entre autres, couvrir environ un tiers de la consommation de carburant maritime d’Israël.
L’étude a été dirigée par le professeur Alexander Golberg de la Porter School of Environment and Earth Sciences de l’université de Tel Aviv et a été publiée dans la revue Energy Conversion and Management: X. La recherche a été menée par la doctorante Maya Mosseri en collaboration avec l’ingénieur Michael Epstein, le professeur Michael Gozin de la Raymond and Beverly Sackler School of Chemistry et le professeur Avraham Kribus de la Fleischman Faculty of Engineering.
Le problème des déchets en Israël s’aggrave. En 2019, le pays a généré environ 5,8 millions de tonnes de déchets municipaux, soit en moyenne 1,76 kg de déchets par personne et par jour, 30 % de plus que la moyenne européenne. Ce chiffre augmente chaque année d’environ 2,6 %. Actuellement, environ 80 % des déchets ménagers en Israël finissent dans des décharges. Les déchets organiques représentent un défi de taille, nuisant à l’environnement par les émissions de gaz à effet de serre, la formation de lixiviats et la pollution de l’air, de l’eau et du sol, souvent accompagnée d’odeurs désagréables.
« Les déchets organiques émettent du méthane, un gaz à effet de serre, et contaminent également les eaux souterraines », explique le professeur Golberg. « Le traitement des déchets est un problème crucial. Les décharges en Israël atteignent leur capacité maximale et, malgré la volonté de réduire au minimum la quantité de déchets, nous sommes obligés d’ouvrir de nouveaux sites, car il n’existe pas d’autre solution. Le principal avantage de notre proposition est que nous réduirons le nombre de décharges nécessaires. Les municipalités investissent des sommes considérables dans le transport et le traitement des déchets, et cette solution a le potentiel de réduire considérablement ces dépenses. »
Afin d’évaluer le potentiel des déchets municipaux en Israël, les chercheurs ont analysé les résultats d’une enquête révolutionnaire menée en 2018 par E. Elimelech et al. de l’Université de Haïfa. L’enquête a examiné la composition des déchets produits par 190 ménages de la ville de Haïfa au cours d’une semaine. Les résultats ont révélé que les déchets organiques mesurables constituent environ 36,4 % des déchets alimentaires et environ 16,4 % du total des déchets ménagers. La catégorie des déchets organiques mesurés a été analysée plus en détail, montrant qu’elle comprenait 67 % de fruits et légumes, 14 % de pains, pâtes et céréales, 8 % d’œufs et de produits laitiers, 5 % de sous-produits tels que des pelures et des peaux, 3 % de viande, de poisson et de volaille, 2 % de bonbons et de biscuits et 1 % de boissons gazeuses. En général, ces déchets organiques contiennent environ 80 % d’eau.
« Les résultats de cette étude ont servi de base au modèle de déchets de notre étude », explique le professeur Golberg. « Nous avons construit un réacteur continu – qui pourra éventuellement être adapté à l’utilisation de l’énergie solaire – pour chauffer les déchets à 280 degrés, et nous avons pu réduire considérablement la quantité d’eau et d’oxygène dans le biocarburant. Nous avons trouvé des catalyseurs rentables qui permettent de contrôler le rapport entre les produits combustibles liquides et solides. Le combustible solide peut être utilisé comme biochar, séquestrant efficacement le dioxyde de carbone pendant des périodes prolongées. Le biochar peut être brûlé dans des centrales électriques comme du charbon ordinaire, et les biocarburants liquides, après valorisation, peuvent alimenter des avions, des camions et des navires. »
En utilisant le modèle représentatif des déchets organiques mesurés, les chercheurs de l’Université de Tel Aviv ont réussi à produire du biocarburant liquide. Ce procédé est polyvalent et convient au traitement de tout déchet ou résidu organique humide, par exemple les déchets organiques des usines alimentaires, des cuisines collectives et des hôpitaux.
Les chercheurs concluent : « La production de biocarburants à partir de composants de déchets organiques peut réduire considérablement le volume de déchets municipaux envoyés dans les décharges, diminuant ainsi la pollution environnementale des sols, de l’eau et de l’air. De plus, la réduction des décharges réduira les émissions de gaz à effet de serre et diminuera la dépendance au pétrole et au charbon. La conversion des déchets en énergie offre également une solution locale pour l’indépendance et la sécurité énergétiques d’Israël. »